De nombreux poissons ont été retrouvés morts, le 1er août, à l’embouchure du Yar, petit cours d’eau qui rejoint la mer sur la plage de Pestin-Les-Grèves. Les algues vertes ont été évoquées comme l’origine possible du problème. Nous avons donc interrogé Yves-Marie Le-Lay, président de Sauvegarde du Trégor-Goëlo-Penthièvre...
Des poissons, cette fois ?
La gendarmerie et l’l’OFB (Office de la biodiversité) excluent une pollution terrestre... Je me suis rendu sur place, et j’ai constaté que la marée, qui remonte sur quelques dizaines de mètre dans le Yar, y a déposé des algues vertes séchées, ainsi que, au pied du pont routier qui enjambe le ruisseau, un amas d’algues vertes en décomposition. Rien qu’en marchant dessus, mon détecteur de gaz, l’hydrogène sulfuré, a retenti à un niveau inquiétant. Dès lors, deux hypothèses, soit le gaz a intoxiqué mortellement les poissons, soit la putréfaction des algues a provoqué une raréfaction de l’oxygène dans l’eau et les a asphyxiés. Les deux hypothèses peuvent s’être conjuguées. Dans les deux cas, ce sont les algues vertes qui sont en cause. J’ai écrit au SAGE (organisme de gestion des eaux)... l’enquête suit son cours...
La préfecture de région (Bretagne), en juillet, annonce moins d’échouages, qu’en dis-tu ?
D’abord, cela dépend des sites. En baie de Locquirec, par exemple, ce n’est pas le cas. Dans les baies de Lannion et Saint-Brieuc, il faut attendre la fin de l’année pour dresser un bilan complet.. Ce n’est pas à mi-juillet qu’ l’on en tire déjà, sous prétexte qu’il serait favorable. En effet, en l’absence de précipitations, les nitrates restent sur la terre, car les épandages ont été effectués. S’il se remet à pleuvoir, les terres lessivées vont les rendre à la mer. (NDLR : il faut ajouter que l’année de référence, 2021, avait égalé les pires années depuis 20 ans...)
Où en est-on des plans algues vertes ?
C’est de pire en pire, une vraie fumisterie ! D’abord, le dernier (PLAV 3) qui va jusqu’en 2027, a été élaboré « à la Macron », sans aucune concertation. Les collectivités territoriales ont été informées au cours de l’élaboration de ce plan mais la concertation s’est essentiellement faite entre les administrations préfectorales et les organisations agricoles majoritaires : FNSEA, coopératives, Chambres d’Agriculture... Quant aux associations, elles n’ont eu droit qu’à la lecture finale avec en prime l’insistance à approuver le texte. En plus, l’objectif affiché est lamentable : « maîtrise des proliférations d’algues vertes à un niveau acceptable en Bretagne à l’horizon 2027 », via la « recherche de synergie entre mesures réglementaires et mesures contractuelles ». Ce qui signifie pas de mesures contraignantes, malgré l’affichage. L’accent est mis sur les fuites d’azote, ce qui veut dire que on ne cherchera même plus à réduire le surplus d’effluents azotés par les exploitations agricoles, on se contentera de les empêcher d’arriver à la mer ! C’est le seul moyen pour l’administration préfectorale de continuer à signer des autorisations d’élevage industriel !
Quelles sont les perspectives ?
Le noyautage des institutions par les tenants du système productiviste se perpétue, à tous les niveaux, dans les administrations, parmi les éluEs (le maire de Hillion, au cœur du problème, vient d’être élu député LREM !), le système continue à cultiver le déni (*) et s’organise pour durer le plus longtemps possible.
Pour notre part, nous avons déposé au tribunal administratif un recours contre l’Etat pour préjudice écologique. C’est en cours d’instruction, mais cela prend beaucoup de temps. Dans le même temps, nous poursuivons notre travail de sensibilisation au travers de conférences autour de la publication de mes deux livres : Algues vertes, un scandale d’Etat aux éditions Libre et solidaire et Putain d’algues ! en seule édition numérique.
(*)cf Algues vertes, un scandale d’état », Yves-Marie Le Lay ; Edition Libres et Solidaires Paris 2020