Cet après-midi, P., arrêté sur le toit lors de l’évacuation de la Maison du Peuple, devait être jugé pour trois chefs d’accusation : rébellion, refus de relevé d’empreintes ADN, et mise en danger d’autrui. Ce dernier chef d’accusation a cependant vite été écarté en raison d’un vice de procédure. Pourtant, c’est bien sur cette dimension de la situation que se sont axées la majeure partie des questions du président.
La logique reste la même que lors des procès précédents : des juges sécuritaires qui se portent volontaires sur les dossiers pour faire plonger du gauchiste, des dossiers vides et une volonté d’écarter ou ignorer tous les éléments qui pourraient permettre à l’accusé de se défendre. Ainsi, P. est accusé de rébellion, aurait tenté de balancer deux coups de pieds aux trois gendarmes qui le portaient pour le séparer du groupe des corps accrochés les uns aux autres pour résister pacifiquement à l’évacuation.
Le président s’appuie sur les témoignages (étrangement tous très similaires) des policiers. En réalité, après visionnage de la vidéo et comme P. l’explique, il a simplement tâché de se rééquilibrer alors qu’on le portait par les deux bras et par une jambe. Il s’est contenté d’opposer une résistance passive à l’évacuation, mais a accepté de descendre lui même du toit une fois séparé du groupe, comme toutes les personnes présentes ce jour-là. Dans sa plaidoirie, son avocat démontre donc qu’on est bien loin d’un acte de rébellion, qui impliquerait de la violence. Pourtant, le procureur réclame 6 mois de prison dont 4 de sursis, ainsi que des dédommagements souvent à hauteur de 1000 euros ou plus pour les cinq policiers qui se sont portés partie civile. Le président, quant à lui, pose des questions qui visent avant tout à condamner les convictions politiques de P. en le forçant à prendre position concernant la résistance à l’évacuation et le contexte dangereux, sa participation à une action de groupe, ou encore son refus du prélèvement d’ADN comme choix politique.
Finalement, après délibérations du jury, P. est reconnu coupable pour les deux chefs d’accusation retenus. Il est condamné à 2 mois avec sursis, 70 heures de TIG, doit justifier pendant 18 mois un emploi, une recherche d’emploi ou une formation en cours. Il doit également dédommager toutes les parties civiles à hauteur de 100 euros par personne en raison des préjudices (moraux, physiques) portés à leur encontre. Une fois de plus, on a donc assisté à un procès politique visant à faire un exemple. (C’est vrai qu’il y a de quoi réfléchir. J’étais sur ce toit, j’ai été détaché-e du groupe de la même façon. Si les gendarmes ne m’avaient pas relevé-e, si j’avais refusé de les suivre à ce moment, j’aurais pu comparaître tout pareil, de même que les 52 autres personnes présentes sur le toit ce jour !) Alors que plusieurs camarades risquent 7 ans de ferme pour une simple action de gratuité des transports, il est urgent de dénoncer cette volonté croissante d’incriminer les militant-e-s. Chaque jour, chaque semaine la répression du mouvement s’accroit. Pour autant, cela ne doit pas nous détourner de nos revendications politiques, en premier lieu : RETRAIT DE LA LOI TRAVAIL !